Idée clée et définitions : Qu’est-ce que le football protagoniste et pourquoi le développer ?

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LE PROTAGONISME DANS LE FOOTBALL

 Ce blog est né en août 2016 à partir d’une idée fixe. Celle-ci revient constamment dans mon esprit, à chaque match visionné, à chaque lecture effectuée et en écoutant les débats de chacun des passionnés de football que nous sommes. Peut-on proposer un football protagoniste, ambitieux, exigeant sans être un top club européen ? Si oui, quels sont les entraîneurs qui le prouvent par l’exemple, dans les clubs d’aujourd’hui et d’hier ?   Existe-t-il un site de référence qui puisse contrer l’idée que le football spectaculaire (et efficace) est réservé uniquement  aux équipes jouant la ligue des champions ? Est-ce à la portée de tous les éducateurs, entraîneurs, clubs, de proposer un football émouvant où le spectateur se régale à la vue de son équipe ?

       Ma réponse est claire et définitive : OUI cela est possible. L’objectif de ce blog est de le prouver, article après article, exemple après exemple, en s’appuyant sur l’actualité,  les rétrospectives tactiques et la philosophie. D’abord que signifie « bien jouer » au football ? Qu’est ce que le beau jeu après tout ? « Bien jouer » et le « beau jeu » est-ce déjà la même chose ?

QU’EST-CE QUE LE BEAU JEU AU FOND ?

     Au football, « le beau jeu » est une expression communément entendue. Pourtant elle mérite une définition claire en séparant les termes. D’abord le « jeu » en lui-même doit être considéré dans sa plus simple déclinaison. « Jouer » vient du latin jocari, qui signifie plaisanter, s’amuser, se distraire. Revenir à l’essence de ce mot permet de prendre conscience que malgré tout ce que le football peut avoir de sérieux, de global, d’important, cela reste une distraction au sein de la société. C’est l’introduction et l’institutionnalisation de la « compétition » par les acteurs de ce sport (enjeux financiers, nationalismes…) qui crée les conditions d’une déviation de cette idée initiale. Pour autant compétition et jeu sont-ils à opposer ? Dites-nous ce que vous en pensez. Beautyfootball vise à montrer que les deux mots peuvent s’associer. Tout dépend des Hommes qui font vivre le football.

  A partir de là chaque équipe fait une proposition pour concilier toutes les contraintes de ce jeu en sa faveur : c’est le « modèle de jeu ». L’histoire de ce sport est traversée par d’innombrables modèles très différents qui ont presque tous permis la victoire sans pour autant faire l’unanimité auprès des spécialistes. C’est ce qui fait l’originalité de ce sport. Qu’est ce que le « beau » dans ce magma de propositions ?

Attention ! Vous pensez que le supporter, et surtout le spectateur de manière générale n’est qu’une donnée anodine du foot, qu’il n’a pas son mot à dire? Vous pensez que l’émotion de la victoire ou de la défaite suffit à tout spectateur lambda ? Très bien, alors passez votre chemin, la suite de ce texte, ne risque pas de vous intéresser.

Dans la continuité de l’analyse de Thibaud Leplat, nous aimons à mobiliser le philosophe Kant pour essayer d’être le plus précis possible. Comme le fait le philosophe allemand, nous distinguons par définition « le beau » de « l’agréable ». C’est une distinction fondamentale. La notion d’agréable renvoie à quelque chose de personnel, que chaque individu est libre ou non de partager. A contrario, la notion de « beau », est plus forte, elle est inter-subjective, puisque le mot renvoie à une émotion supérieure, qu’un individu initié ou non éprouve devant la chose observée. Ce qui est beau procure une émotion « universelle », au-delà de notre amour particulier et du contexte. Sans prétendre à une « objectivité » impossible, le « beau », par l’accès à une reconnaissance extrêmement plurielle, collective, dépasse l’agréable. Tout le problème est de la formaliser, de l’exprimer par des mots pour la partager. Vouloir la partager, c’est déjà se mettre en difficulté car les mots ne sont pas à la hauteur de l’émotion ressentie. Derrière chaque mot se cache une interprétation différente pour chacun ce qui va créer du débat.

Francisco « Pacho » Maturana, grand entraîneur colombien, concède lui-même toute la difficulté de mettre des mots sur ces émotions : « Bien jouer, les gens savent ce que c’est. Il ne faut pas chercher plus loin.  Il y a des matchs où même si leurs équipes perdent, les spectateurs applaudissent à la fin. Le public sait parfaitement reconnaître le bon football. Les gens ne sont pas stupides et les footballeurs jouent pour eux.« 

Cependant, par analogie avec Kant, nous croyons que le football est un fait social total et que le spectateur est celui qui le fait vivre dans nos cœurs jour après jour. Dans ce cadre, le  « beau jeu » c’est procurer des émotions aux spectateurs, aux joueurs, et à soi-même. Les émotions que procurent le « beau jeu » sont positives : joie, plaisir, enthousiasme, inspiration. Si le spectateur s’ennuie, ne prend aucun plaisir à regarder son équipe, voire pire s’endort, il développe des émotions négatives en regardant un match. Peut-on dire que les équipes sur le terrain produisent du beau jeu ? Hélas, non, même si au final le résultat est une victoire 1-0…

BIEN JOUER ET BEAU JEU : DEUX EXPRESSIONS BIEN DIFFÉRENTES

    Mais s’arrêter là dans l’explication serait clairement insuffisant. Car, pratiquer un « beau » football ne signifie pas toujours « bien » jouer au football. Beaucoup de suiveurs ou de techniciens n’ont pas conscience de cette différence fondamentale. Si un entraîneur fait basculer en sa faveur les contraintes du jeu et qu’il remporte la victoire à la fin il aura « bien » joué au foot. Cet argument est indéniable et utilisé par beaucoup d’entraîneurs mais il est clairement limitant. Par exemple, un manager qui utilise les forces de son effectif,  des joueurs costauds forts dans le jeu aérien et sur les longs ballons, qu’il gagne comme cela,  il aura « bien » joué au football. Il a maximisé le potentiel de son équipe. L’idée ou le groupe d’idées de jeu qu’une équipe réussit à appliquer sur le terrain, posant ainsi des problèmes à l’adversaire tout en résolvant ceux que l’adversaire pourrait proposer, tout cela en gagnant les matchs, c’est ça « bien jouer » au football. Même si nous devons rappeler que la victoire dépend de nombreux facteurs qu’aucun plan de jeu ne peut  anticiper a 100%.

     Pour autant, tous les moyens sont-ils bons pour gagner ? Pour tous ceux qui ont touché un ballon un jour, réaliser un match dans la cour d’école, tous les gestes du football se valent-ils vraiment ? Dans ce sport, l’exploit individuel est-il plus simple que l’harmonisation d’un collectif ? L’objectif de ce blog est de montrer que certains moyens sont définitivement supérieurs à d’autres. Qui définit ce qui est beau? La réponse est difficile. Mais, qu’on le veuille ou non, tout le monde sait, au plus profond de son âme, qu’il est plus facile de détruire que de construire. Car construire requiert une technique, un processus de réflexion obligatoire, tandis que détruire est souvent très intuitif. Ce postulat s’applique aussi au football. Par exemple, dégager le ballon lorsque il approche de nous est toujours plus facile, plus instinctif, que de prendre le temps de le contrôler pour le donner à un partenaire malgré la pression. Tout joueur de football s’est rendu compte quel que soit son niveau, qu’il est plus difficile de s’exprimer techniquement quand l’espace et le temps se réduisent. Cette variable est moins forte quand il s’agit de détruire le jeu adverse. Ces exemples, certes caricaturaux, permettent de faire comprendre l’élément qui, dans le football, permet d’atteindre le beau et d’expliquer que toutes les manières de jouer ne se valent pas malgré la victoire. La technique et l’intelligence sont les deux valeurs les plus importantes pour tenter de réussir ce projet.

      Qui n’a pas souvent blagué devant son incapacité à dribbler deux ou trois joueurs sur un terrain malgré les après-midi d’entraînement qu’il a effectué ? Pourquoi admire-t-on l’Alalanta Bergame de Gaspérini, l’Ajax d’Amsterdam, le Manchester de Ferguson ou les équipes de Guardiola ? Car, avec des joueurs différents, plus moins célèbres, il y a  conjointement une qualité individuelle et l’expression dans un cadre collectif complexe à mettre en place. Dans ces équipes, chacun peut ressentir que l’on joue « pour l’autre » avant de jouer « pour soi ».

Ainsi,  qui est le juge du beau, de la créativité ? Le spectateur. C’est une clé de voûte indispensable. Le footballeur, le manager ou le président ne doit jamais oublier qu’il pratique ce jeu pas seulement pour lui mais aussi pour d’autres personnes. Ces spectateurs, il faut les respecter.  Ces individus hiérarchisent, valorisent même s’ils n’ont pas toujours les mots ou le langage adéquat. Même inconsciemment, le passionné va toujours au-delà de la simple victoire ou défaite lorsqu’il vient voir un match. Ils placent le match sur l’échelle de la beauté. Sinon comment expliquer que l’on souvienne des Pays-Bas de Johan Cruyff alors qu’ils n’ont rien gagné ? Comment expliquer ces « clasicos » où les supporters (du Real Madrid par exemple), applaudissent Ronaldinho malgré la défaite de leur équipe ?

PROPOSER UN BEAU FOOTBALL : D’ABORD UNE HISTOIRE DE SENSIBILITÉ POUR LES TECHNICIENS

     C’est maintenant que beaucoup de formateurs, entraîneurs ou éducateurs rétorqueront  que ce jeu technique et intelligent en bref protagoniste, est réservé à une élite, une élite de clubs, ou une élite d’entraîneurs célèbres. De plus, on ne pourrait pas pratiquer un football protagoniste avec tous les joueurs. Il faut forcément un très gros budget pour tenir cette ambition. Cette idée n’est pas fausse mais totalement restrictive.

  Si le football protagoniste est difficile à définir dans son ensemble tant ses déclinaisons sont nombreuses, on peut s’en approcher en expliquant ce qu’il n’est pas. Le football protagoniste s’oppose à la spéculation. Il est d’abord fait de prises d’initiatives. Prenons l’exemple du football des enfants et des adolescents dans lequel certains lui reprochent un excès de « championnite [sic] ».  Durant la formation du pratiquant, doit-on lui apprendre prioritairement à « attendre », à « spéculer sur l’erreur de l’adversaire » ? Même s’il faudrait un article entier pour définir ce qu’est « attendre dans le football », nous pensons qu’il est plus utile et éducatif d’enseigner d’abord au joueur à « se prendre en main », à « prendre ses responsabilités », à « montrer son talent ». En effet, c’est cette école qui permet de remporter de nombreux matchs au football mais qui permet surtout de remporter de nombreuses victoires dans la vie.

     C’est là que ce blog entre en jeu, en constituant un portail de ressources pour tous les passionnés et autodidactes qui partagent cette idée qu’un football attrayant n’est pas qu’une question de moyens. Nous proposons à travers ces articles et analyses des modèles de jeu de référence qui puissent servir d’inspiration à tous les passionnés et les entraîneurs qui veulent se lancer dans une telle aventure. Un célèbre technicien à parfaitement résumé la situation : « Il n’y a pas de bon ou mauvais entraîneurs : il y a les entraîneurs courageux et il y a les autres« .  Cette phrase limpide résume tout, car  les conditions décisives pour défendre un football qui tire ce sport vers le haut sont simples mais difficiles à appliquer : être ambitieux, exigeant, assumer la défaite, connaître ce sport de A à Z, son histoire, sa culture technique et tactique tout en étant toujours en éveil, observateur.

 A travers la parution d’articles réguliers, il s’agit de donner la possibilité à ceux qui aiment le football protagoniste  de le découvrir. A l’image des apprentis peintres prenant le temps d’observer les grands maîtres pour le devenir à leur tour, il s’agit d’analyser les entraîneurs du présent et du passé qui ont su donner un style à leur équipe afin de vous aider à créer votre propre style !

En un mot, ce blog s’adresse à tous les passionnés exigeants !

THOMAS Dimitri

PS : je profite de ces mots pour remercier Olyanna Rubio Lopez et Alexandre Haddad sans qui ce blog n’aurait jamais existé. Merci a eux pour le soutien!