Depuis le mois d’Octobre 2021, le légendaire club de Newcastle a changé de monde. Après une quinzaine d’années ponctuées principalement d’échecs sportifs, le rachat du club par le consortium saoudien et quelques associés britanniques change la donne. Désormais, Newcastle sera un instrument du soft power saoudien. Mais, dans quelle politique sportive vont-ils s’engager ? Vont-ils imiter les méthodes du Russe Roman Abramovich lorsqu’il était à Chelsea ou des Qataris au Paris-Saint-Germain en tentant de récupérer un maximum de titres et de prestige par la création d’une équipe de stars renommées à l’échelle mondiale ? Ou vont-ils plutôt imiter la méthode américaine d’Arsenal, plus discrète, fondée sur un recrutement de jeunes joueurs à très fort potentiel nécessitant un encadrement de qualité pour performer ? Avec près de 100 millions d’euros dépensés en 2021/2022, avec l’arrivée de l’entraîneur Eddie Howe en novembre 2021, les ambitions semblent très élevées de la part des dirigeants de Newcastle. Il ne s’agit rien de moins que d’améliorer l’image d’un pays grâce au club et par l’acquisition non seulement de titres mais aussi par la proposition d’un football élaboré qui fait parler. Ainsi, si les politiques de Soft power sont très intéressantes à suivre, il s’agit pour nous de revenir au « pitch » , et d’analyser comment cette nouvelle équipe de Newcastle s’anime sur le pré. Au moment de l’écriture de ces lignes, ce collectif siège en haut du tableau au sein d’un des championnats les plus exigeants du monde. Cette équipe semble donc pour le moment alignée sur les intérêts des investisseurs : gagner et rayonner ! Analyse.
N.B : en cas de première visite sur le site n’oubliez pas d’aller lire mon « idée clef », car elle est cruciale pour comprendre tout le site. Vous ne le regretterez pas.
Note au lecteur : Cette analyse s’appuie sur un échantillon de 5 matchs dont 4 qui ont pu être séquencés précisément. Ainsi, les statistiques éventuellement présentes doivent être relativisées et surtout mises en perspective sur un temps plus long. De plus, cette analyse n’a pas la prétention à l’exhaustivité. Les 4 rencontres principales sur lesquelles s’appuient l’article sont l’opposition contre Chelsea, Tottenham, Leicester et Brentford. Crédits photos : iconsport.fr. Les chiffres proviennent de la plateforme whoscored.com et Opta.
ELEMENTS DE CONTEXTE
Newcastle est un club de légende en Angleterre et il est possible de trouver du contenu pertinent et précis sur son histoire dans des ouvrages spécialisés ou sur le web. C’est pourquoi, nous nous intéresserons simplement au profil d’Eddie Howe et à la construction de l’effectif à sa disposition. Notons que pour un projet d’envergure internationale comme celui de Newcastle, les dirigeants ont choisi un entraîneur britannique pour mener les débuts du projet. De plus, à part un titre en deuxième division avec Portsmouth en 2003, l’entraîneur sélectionné par le » board » arrive sur le banc avec une renommée européenne relativement faible et sans titres pour le légitimer. Ce sont surtout les suiveurs assidus du football anglais et les connaisseurs qui reconnaîtront la clairvoyance d’un tel choix et tout le travail accompli par ce jeune entraîneur par le passé.
En effet, Eddie Howe est presque le joueur puis l’entraîneur d’un club, en l’occurrence Bournemouth, où il a passé l’essentiel de sa carrière. Avec plus de 250 matchs en tant que joueur puis en tant qu’entraîneur au sein de ce club, c’est un homme qui a fait preuve de fidélité envers cette institution. Surtout, il a réalisé avec tous les dirigeants du club, un travail gigantesque pour faire de cette ville anonyme du sud-ouest de Londres une équipe prétendante au plus haut niveau anglais. En effet, en 2013, alors qu’Eddie Howe est entraîneur principal il réussit pour la première fois de son histoire à faire monter ce club en deuxième division. Puis, en 2015, nouvelle montée pour Bournemouth qui accède à la Premier League dans laquelle l’institution se stabilise cinq saisons avant une redescente.
Eddie Howe semble donc être un entraîneur qui aime bâtir, construire sur le moyen et long terme au sein de clubs ambitieux. Avec son arrivée à Newcastle, c’est une construction d’un tout autre acabit qu’il va falloir réussir à mener. Pour la première fois, Eddie Howe semble avoir la capacité sportive d’aller chercher un titre (comme une FA Cup dans un premier temps) ou une qualification pour une coupe d’Europe, compétition dans laquelle il n’a jamais pu se montrer. Pour cela, il dispose d’un effectif qui s’étoffe et s’améliore mercato après mercato. Si, pour le moment, il n’a pas de « grande » star à gérer, cela pourrait vite arriver. En attendant, il s’agit pour lui de mener le plus haut possible un effectif composite où des éléments expérimentés de Premier League (comme F.Schar, M.Almiron, ou J.Shelvey) côtoient des joueurs talentueux tels que B.Guimaraes ou J.Willock. Comment cela s’anime-t-il sur le terrain ?
COMPOSITION ET ANIMATION DE NEWCASTLE
NEWCASTLE AVEC LE BALLON : ÉLOGE DE LA SIMPLICITÉ
Disposés dans un 1-4-3-3 lorsqu’ils manipulent le cuir, ce qui frappe dans cette équipe c’est la capacité à exécuter merveilleusement un plan de jeu régulier, constitué d’idées tactiques connues et reconnues tout en s’adaptant à une adversité de haut-vol à chaque rencontre. Afin de renforcer les automatismes ainsi que de créer des relations techniques et affectives fortes dans l’équipe, Eddie Howe s’appuie sur des titulaires qui changent peu et des rotations circonstancielles au sein d’un groupe relativement restreint. Par exemple, 9 joueurs sur les 24 à sa disposition dans son effectif accumulent à peine 300 minutes de jeu sur les 1530 minutes possibles en championnat au moment de l’écriture.
Si Eddie Howe aime le 1-4-3-3, ses joueurs lui rendent bien. Effectivement, les implications tactiques pour qu’un tel système fonctionne semblent très bien correspondre aux caractéristiques des joueurs. Dans la pointe basse du triangle, le milieu reculé Bruno Guimaraes, venu de Lyon évolue tel un poisson dans l’eau. Avec un volume de jeu très important et une qualité technique impressionnante, il est tout à la fois capable d’organiser le moment avec ballon de son équipe par ses choix de jeu extrêmement justes, et de s’impliquer à la récupération par des compensations et des anticipations bien senties. Il est un véritable organisateur et une pièce maîtresse de ce groupe tant et si bien que son absence pourrait s’avérer fatale à l’équipe à l’image d’un G.Deulofeu dans le groupe d’Andréa Sottil à l’Udinese. Affirmons-le clairement, avant le mercato d’hiver 2023, il n’a pas de remplaçant digne de ce nom à son poste.
Dans un tel système, l’animation des couloirs et les relations tissées entre ces zones de jeu et les joueurs évoluant en tant que relayeurs sont aussi cruciales pour provoquer des déséquilibres chez l’adversaire. Là encore, Eddie Howe dispose de 5 joueurs qui semblent avoir toutes les qualités pour exprimer les attendus du coach britannique. Almiron, Willock, Joelinton et Longstaff disposent d’une grande mobilité, et surtout d’une très grande complémentarité. Par exemple, Willock et Joelinton sont si proches sur le terrain qu’ils n’hésitent pas à permuter dans leur rôle de nombreuses fois au cours d’un match, le premier passant ailier et laissant le poste de relayeur au second puis vice et versa. De l’autre côté, si Almiron dispose plus d’un profil d’ailier « à l’ancienne » il peut aussi jouer à l’intérieur et il est parfaitement secondé par Longstaff et Trippier dans ses initiatives. Ces derniers aiment offrir des appels qui permettent de créer du chaos chez l’adversaire permettant à Almiron de créer des situations dangereuses à sa guise, qu’elles soient individuelles ou issues d’une combinaison plus collective. D’ailleurs Miguel Almiron n’a jamais réussi un début de saison aussi abouti en termes statistiques que cette saison : avec 9 buts en 16 matchs, 1 passe décisive, plus de 2 tirs par match et d’innombrables duels gagnés il est le joueur « clutch » de ce collectif pour le moment. Là encore, il ne faut pas isoler cette performance individuelle de l’ensemble de la proposition collective et notamment du soutien de Trippier et Longstaff par exemple. Ces deux joueurs sont très précis dans leur jeu de passe (2,6 passes clés par match pour Kieran Trippier soit plus que Martin Odegaard à Arsenal) ce qui permet par exemple de multiplier les centres dangereux ou les passes « laser » dans la surface de réparation adverse. Si il y a un « bémol » dans cette configuration à souligner c’est peut-être le profil de Dan Burn en tant que latéral gauche. Si celui-ci apparaît comme un élément d’équilibre dans cette équipe extrêmement généreuse en courses sans ballon, il semble moins à l’aise techniquement avec la ligne de touche si près de lui. En outre, son gabarit imposant laisse à penser qu’on a plus un défenseur central mis sur un côté qu’un véritable défenseur latéral de métier. Cependant, il joue vraiment un rôle stabilisateur conséquent de par ses qualités dans le domaine aérien, dans l’interception et dans le contre afin par exemple de récupérer le ballon et sécuriser la possession dans la foulée.
Enfin, dans cette analyse de l’effectif des Magpies et notamment du secteur le offensif ajoutons quelques mots sur l’expérimenté Callum Wilson qui occupe le plus souvent la pointe de l’attaque. Joueur très proche d’Eddie Howe avec lequel il évoluait sous le maillot de Bournemouth, il se fond parfaitement dans le modèle de jeu et les occurrences que reproduit cette équipe. Par exemple, les offensives de Newcastle ont besoin d’une grande implication des joueurs les plus hauts sur le terrain pour faire progresser le ballon, donner des possibilités dans la profondeur, mais aussi par du jeu en appui permettant ensuite de se projeter sur un côté pour combiner. Dans le modèle d’Eddie Howe le joueur le plus haut sur le terrain se doit d’être relativement complet : Callum Wilson est taillé pour ce projet. A l’aise, tant dos au jeu que dans l’attaque de la profondeur, il est d’une grande finesse technique ce qui lui permet à la fois de donner de la continuité au jeu par ses relais mais aussi de finir les actions par des frappes ou des gestes de classe. Avec 6 buts au compteur et 2 passes décisives en 10 titularisations, il est clairement sur les rails d’une grande saison s’il réussit à se maintenir à un tel niveau.
Ceci étant dit, quelle est donc cet alliage de simplicité et d’efficacité incarnée dans le moment avec ballon de Newcastle ? Si la vidéo ci-dessous sert d’éclairage mentionnons en quelques mots les grandes forces de cette équipe. Premièrement, les Toons font preuve d’une excellente maîtrise dans l’exploitation de la largeur du terrain. Ces derniers savent étirer l’adversaire par un jeu court de fixation dans une zone, suivi d’un renversement à l’opposé qui enclenche une prise de vitesse instantanée, permettant des combinaisons sur le côté ouvert pour du jeu à 2 ou 3, à travers des « une-deux », ou des attaques du « demi-espace » ainsi découvert. Deuxièmement, ce jeu très au large est difficile à défendre, car il s’accompagne d’une très belle utilisation de la profondeur. En effet, si un joueur comme Bruno Guimaraes parvient à obtenir du temps pour renverser, c’est parce qu’une menace constante pèse sur l’arrière garde. Effectivement, Almiron, Willock ou Joelinton peuvent toujours plonger dans le dos de celle-ci. Ainsi, toute tentative de défense en avançant est rendue assez périlleuse. Conséquemment, l’adversaire peut se retrouver dans le dilemme suivant : soit gicler très vite sur un milieu organisateur mais celui-ci peut très vite libérer le ballon dans la profondeur en réponse, soit lui laisser du temps et préparer un coulissage couloir mais la rapidité d’exécution et la mobilité des Magpies quand ils sont proches de la ligne de touche peut aussi mettre grandement en danger. L’une des grandes forces de Newcastle réside dans son jeu sur les côtés et la qualité des combinaisons qui y sont proposées. Avec Almiron, Saint-Maximin, Joelinton, Willock, Eddie Howe dispose de nombreux dribbleurs de qualité capables de faire la différence en 1 contre 1 voire en 1 contre 2. Étant donné que ces joueurs créatifs sont constamment accompagnés de solutions collectives de par les courses sans ballon des coéquipiers, l’adversaire se retrouve encore dans des dilemmes difficiles à jouer. Ainsi, en proposant constamment des choix difficiles à l’adversaire dans sa défense de la largeur ou de la profondeur, Newcastle parvient à se créer de nombreuses occasions. Ces occasions qui sont d’ailleurs très souvent ponctuées de centres et d’une très grande présence dans la surface de réparation afin de se donner le plus de chances possibles de conclure. Avec 19 centres par match en moyenne ils sont dans la fourchette la plus haute de la Premier League. Tout l’enjeu d’une saison réussie en juin sera dans la capacité à proposer quelques nouvelles séquences face à des adversaires qui désormais se méfient plus que jamais de la Toon Army. Car cette simplicité magnifiquement exécutée va être de plus en plus connue des adversaires, ce qui rendra la réussite offensive peut-être plus difficile surtout si certaines performances individuelles déclinent (Almiron va-t-il vraiment se maintenir à un tel niveau toute la saison ?).
Les coups de pied arrêtés incarnent un outil de diversité possible et le staff de Newcastle semble beaucoup les travailler avec ses joueurs. Au-delà des 6 buts marqués sur cette phase de jeu (soit 20% de leur total), il est assez frappant de constater que cette équipe aime tenter des combinaisons mais surtout proposer des déplacements variés (blocages d’adversaires, courses de fixation 1er poteau pour ouvrir 2ème etc…) pour contrecarrer l’opposant dès que cela est possible. N’oublions pas de mentionner la qualité immense de Kieran Trippier dans ce domaine, qui réalise sur coup de pied arrêté comme dans toutes les autres facettes de son jeu, une grande saison. Pour le reste, des détails plus importants sur le moment avec ballon de Newcastle sont à découvrir ci-dessous.
LE MOMENT AVEC BALLON DE NEWCASTLE EN RÉSUMÉ VIDÉO
NEWCASTLE SANS LE BALLON : TOUJOURS FAIRE RECULER L’ADVERSAIRE
Si nous avons longuement évoqué les qualités et la complémentarité de l’ensemble des joueurs composant les lignes les plus offensives, il est frappant de constater l’implication extrêmement importante de ces mêmes joueurs dès la perte du cuir. Avec 11 buts encaissés en 18 matchs de Premier League, il est clair qu’Eddie Howe et ses collègues ont réussi à construire des habitudes et des réflexes communs sans ballon qui s’avèrent très efficaces. Comment s’articule cet ensemble sur le terrain ?
La première idée mentionnée ici concernant ce moment de jeu est également la plus importante et chaque entraîneur analysé sur ce site semble la partager (au moins en partie). En bref, elle consiste, à chaque fois que cela est possible, à défendre en avançant, en gagnant des mètres dans le camp adverse, plutôt qu’en proposant un attentisme dans son propre camp spéculant ainsi sur une hypothétique erreur de l’adversaire. Si cette idée est facile à défendre dans les dîners mondains ou sur les réseaux sociaux il s’agit de mesurer ensemble, toute la complexité qu’elle implique pour sa mise en place efficace dans un collectif, surtout lorsque l’équipe en question ne dispose pas des meilleurs joueurs d’une compétition où dans le cas de la Premier League, lorsque le niveau d’adversité est extrêmement élevé.
Eddie Howe a d’abord réussi à concerner l’ensemble des joueurs pour que ces derniers restent très mobilisés dès la perte du ballon où qu’elle soit sur le pré. Par conséquent, tous les joueurs en commençant par celui qui perd la sphère savent immédiatement changer de condition mentale pour passer du statut de joueur « créateur d’actions » à celui de joueur « récupérateur de ballons ». Ainsi, il est possible de fermer la zone dans laquelle l’adversaire tente de ressortir, en harcelant immédiatement le porteur de balle, en osant avancer sur toutes les solutions courtes à disposition de ce dernier, même quand elles sont loin de la zone initiale des joueurs de Newcastle. En effet, ce 4-3-3 s’articule autour d’un pressing d’abord orienté sur l’homme plus que sur la zone même s’il serait caricatural de résumer ce moment de jeu des Magpies par une suite de courses contre des numéros floqués dans le dos. L’objectif, quel que soit la position des joueurs adverses est d’empêcher le plus possible l’accès au centre du terrain, et de créer une tenaille entre le demi-espace et le couloir adverse.
Concrètement, le premier joueur harceleur va systématiquement tenter une course soit oblique (afin d’orienter le déplacement adverse vers la zone voulue), soit droite afin de restreindre le plus vite possible ses angles de passes. A partir de ces premiers déplacements, les coéquipiers vont pouvoir adapter leurs mouvements vers les solutions qui apparaissent possibles à l’adversaire afin de les bloquer immédiatement. Pour l’opposant, la conséquence finale étant soit d’insister par une prise de risque supplémentaire, soit de jeter le ballon et donc de faciliter la récupération de la Toon Army. Face à la vitesse et à l’agressivité d’Almiron, Joelinton, Wilson, Willock et les joueurs sortis du banc, c’est un véritable calvaire qui est proposé aux relanceurs adverses. Quelques statistiques peuvent étayer ce constat visuel : le PPDA (passes per defensive action soit le nombre de passes « autorisées » par Newcastle avant le lancement d’une séquence de pression) est fixé à 11.3, seuls Chelsea et Leeds affichent un chiffre plus petit, symbolisant donc une agressivité dans le harcèlement parmi les plus importantes de la ligue. De plus, avec 16 tacles et 9 interceptions par match en moyenne, ils font mieux que Liverpool, Manchester City ou même Arsenal dans ce domaine.
Si ce travail doit être valorisé à sa juste mesure c’est qu’il implique de nombreux facteurs de réussite, et de lourdes conséquences en cas d’échec. Les joueurs doivent reconnaître ensemble et en même temps le moment pour se lancer, ce qui nécessite une harmonisation mentale plus complexe que de courir derrière le ballon pour attendre l’éventuelle erreur adverse. Ici, Newcastle sait parfaitement reconnaître les passes négatives adverses pour tenter d’avancer sur ce timing. De plus, cela nécessite d’immenses efforts dans la reproduction de sprints, qui peuvent s’avérer très énergivores sur la durée voire difficiles à continuer durant un match quand les courses sont faites sans réussite de par la qualité de l’adversaire pour se sortir de la pression. Si l’on ajoute un tableau d’affichage défavorable, cela nécessite un effort de mobilisation de la part de l’entraîneur et des joueurs encore plus important. En outre, la nécessité d’être compact, de proposer peu d’espaces dans les interlignes est tout aussi décisive qu’une défense fondée sur la spéculation, car les espaces laissées derrière soi sont très importants et facilement exploitables pour l’adversaire. Ajoutons aussi, toutes les qualités exigées pour la dernière ligne défensive lorsqu’on souhaite appliquer un modèle de jeu si ambitieux. Il s’agit de savoir suivre, gicler et oser « dézoner » pour gagner de nombreux duels en avançant tout en sachant que les attaquants peuvent profiter de grandes opportunités au moindre raté. Il s’agit aussi de savoir gérer l’espace derrière soi, avec des positionnements adéquats face à des ballons profonds et aériens. Néanmoins, les récompenses possibles d’une telle vision de la récupération du ballon sont désormais connues et reconnues : avec une telle qualité dans les 1 contre 1, une telle vitesse, et des joueurs très généreux dans les appels, les récupérations dans le camp adverse de Newcastle peuvent apporter de grands dangers par les transitions redoutables qu’elles peuvent engendrer.
Pour conclure, et afin d’insister sur les forces et faiblesses de cette vision du football appliquée au cas de Newcastle, analysons la manière de défendre des Magpies contre Arsenal le 03 janvier 2023. Effectivement, les joueurs d’Arteta ont parfaitement su mettre en exergue les faiblesses de Newcastle et il s’en est fallu de peu, pour que les Toons subissent leur première défaite de la saison. Arsenal a d’abord montré à quel point le pressing haut dans le camp adverse, orienté sur l’homme, pouvait être annihilé par la qualité technique sous pression, par les dézonages des joueurs (Zinchenko a souvent quitté son couloir pour l’axe) créant ainsi la confusion chez les noirs et blancs. De surcroît, lorsque l’équilibre de ton modèle de jeu repose en grande partie sur la performance offensive et défensive d’un joueur clé, ici Bruno Guimaraes et que celui-ci se trouve sous l’éteignoir (gros travail d’Odegaard sur ce point), alors c’est toute l’équipe de Newcastle qui subit des difficultés. Arsenal a également démontré que des défenses orientées sur l’individu, malgré la volonté de créer des supériorités numériques dans certaines zones du terrain, peuvent être battues en brèche par la création de supériorités qualitatives. Par exemple, le jeune ailier Bukayo Saka, toujours mis dans la zone de Dan Burn avec la volonté de l’éliminer a semé une immense pagaille, et les retours de Joelinton très bas pour soutenir son partenaire ont permis de limiter la casse tout en libérant des Gunners ailleurs sur le terrain. Avantage Arsenal encore une fois. D’autre part, à force d’échouer à récupérer le cuir en position haute, les joueurs de Newcastle ont inévitablement reculé, proposant un 1-4-5-1, qui perdait mètre sur mètre au fil du match jusqu’à finir dans sa propre surface, car les bonnes volontés n’ont pas pu résister à l’intensité physique mêlée aux problèmes tactiques et à la qualité technique proposée par Arsenal. Sans une abnégation de tous les instants, un grand Nick Pope dans les buts des Toons et une réussite certaine, les joueurs d’Eddie Howe n’auraient pas pu récupérer le point du nul.
LE MOMENT SANS BALLON DE NEWCASTLE EN RÉSUMÉ VIDÉO
L’équipe de Newcastle présente des faiblesses certaines. Va-t-elle tenir le rythme de cette compétition intense avec de faibles rotations alors qu’elle se trouve toujours engagée en FA Cup et en Carabao Cup ? Va-t-elle parvenir à s’adapter à des rapports de force complexes et des équipes qui scrutent toujours plus dans le détail un effectif qui est passé du statut de « surprise » à celui « d’outsider » ? Va-t-elle réussir à passer la saison sans blessures graves pour ses joueurs les plus importants comme Almiron, Trippier ou Guimaraes ? Si seuls les voyants pourront répondre à ces questions avant la fin de la saison, les passionnés peuvent commencer par s’enfoncer dans leur canapé pour tout analyser. Car, alors que la moitié de la saison est presque passée, cette équipe est séduisante de par ce qui est proposé. Réussir de telles performances avec des joueurs qui ne sont pas des références, voilà qui est inspirant. Observer, s’inspirer, et parler sur les terrains européens du Newcastle de 2022-2023 c’est déjà exister. Et par conséquent, c’est déjà exaucer indirectement les vœux du soft power saoudien : dorer son image et récupérer les fruits du travail bien fait.
POUR ALLER PLUS LOIN :
2/ https://www.coachesvoice.com/cv/arsenal-newcastle-tactics-arteta-howe-zinchenko-trippier/
3/ https://twitter.com/NajimMedini/status/1607410349065519105